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Maladies rhumatismales

Publié le 28 mar 2024Lecture 5 min

Que faut-il penser des PRP dans la gonarthrose ?

Agnès LARA, Perpignan

Des résultats d’études cliniques à ceux de la vraie vie, Karine Louati a fait le tour des données existantes dans la littérature pour discuter de l’intérêt du plasma riche en plaquettes (PRP) dans la gonarthrose. Le rationnel est intéressant, mais les résultats des essais cliniques restent contradictoires et contrastent avec les observations en vie réelle, probablement du fait de la variabilité d’un grand nombre de paramètres. Le Groupe de recherche internationale sur les injections de plaquettes a émis de premières recommandations.

Les recommandations récentes de la SFR concernant la prise en charge de la gonarthrose préconisent d’associer des interventions pharmacologiques et non pharmacologiques. Un traitement chirurgical, principalement la pose d’une prothèse de genou, peut être discutée en cas d’échec. Une place existe probablement entre les deux pour l’injection intra-articulaire de concentrés plaquettaires (Plasma Riche en Plaquettes ou PRP), même si ces dispositifs médicaux ne sont pour le moment pas remboursés par la sécurité sociale. Et alors que les données de la littérature concernant ces injections restent encore discutées, les injections de PRP sont de plus en plus pratiquées. Que faut-il en penser ?   Quel rationnel pour les PRP dans l’arthrose ? Rappelons que les PRP appartiennent à la famille des thérapies régénératives et qu’ils visent à préserver les tissus en modulant le micro-environnement pathologique. En effet, outre leur implication dans la coagulation, les plaquettes jouent également un rôle dans prolifération, la différenciation cellulaire, la cicatrisation tissulaire, et même un rôle anti-inflammatoire via le relargage de facteurs de croissance et autres cytokines. Elles peuvent ainsi avoir un effet chondroprotecteur, chondroprolifératif, et anti-inflammatoire sur la membrane synoviale. La présence possible de cytokines pro-inflammatoires dans le PRP doit cependant conduire à la prudence en cas de maladies inflammatoires non contrôlées.   Des essais cliniques contradictoires Une vingtaine d'essais randomisés contrôlés à long terme ont évalué les PRP dans la gonarthrose, avec des résultats souvent contradictoires. Ainsi, l’étude australienne RESTORE s’est révélée négative, ne montrant pas de différence significative entre les groupes PRP et placebo sur la douleur, ni sur le volume du cartilage à 12 mois(1). Il s’agissait de près de 300 patients plutôt obèses et souffrant de gonarthrose de stade modéré. Un tiers d’entre eux avaient un épanchement articulaire à l'IRM à l’inclusion. D’autres essais, comme celui de Chu et al., ont au contraire rapporté des résultats positifs(2). Ce dernier essai avait sélectionné une population de plus de 600 patients avec des gonarthroses moins avancées. Aux différents temps de suivi et jusqu’à 5 ans, les scores WOMAC étaient meilleurs dans le groupe ayant reçu des injections de PRP versus placebo, sans effet secondaires majeurs rapportés. Une réduction significative de la perte de cartilage en IRM a également été observée dans le groupe PRP à 5 ans.   Que disent les méta-analyses ? Elles sont particulièrement nombreuses, mais leur qualité est hétérogène. Celle de Costa et al.(3) a comparé les effets des PRP dans la gonarthrose par rapport aux autres traitements injectables (acide hyaluronique, corticoïdes ou placebo). Elle a inclus 40 essais contrôlés randomisés ayant évalué la douleur, la fonction et d’autres paramètres. Par rapport à l’acide hyaluronique, le PRP s’est montré supérieur sur le plan de la douleur et de la fonction (à moyen et à long terme), avec moins de certitude sur le second point. Cette supériorité a été retrouvée dans la comparaison au placebo sur la douleur à moyen terme et sur la fonction à moyen et long terme. Des résultats à modérer toutefois du fait de l’hétérogénéité des protocoles employés, des concentrations en plaquettes pouvant varier d’un facteur 4, et de la qualité insuffisante des essais.   Des données de « vraie vie » Une étude rétrospective italienne, qui avait suivi une centaine de patients ayant reçu 1 injection hebdomadaire de PRP durant 4 semaines, a rapporté un taux de satisfaction de près de 80% à 2 mois. Parmi les paramètres susceptibles d’expliquer la discordance observée entre les essais cliniques et les études observationnelles, ont été discutés : la grande variabilité des profils des patients, des kits et des protocoles employés, des caractéristiques des PRP obtenus. L’objectif thérapeutique des injections de PRP peut aussi varier en fonction du patient : réduction de la douleur, amélioration de la fonction ou rallongement du délai jusqu’à la pose de prothèse. Concernant ce dernier point, plusieurs études ont d’ailleurs montré des reports de prothèse non négligeables chez plus de trois quarts des patients traités, avec un délai médian de l’ordre de 4 années. Enfin, l'effet placebo des injections de PRP est loin d’être négligeable dans la gonarthrose, sans doute en raison du temps passé avec le patient au cours du protocole, avec une taille d’effet supérieure à celle du paracétamol et similaire à celle du naproxène.   Les préconisations du CRIIP pour la pratique clinique Le CRIIP, Groupe de Recherche Internationale sur les Injections de plaquettes (www.griip.org) a émis des recommandations sur l’utilisation des PRP en pratique, à partir des données disponibles dans la littérature. Il suggère de proposer un traitement par PRP en seconde ligne, après échec des traitements oraux ou non pharmacologiques. Leur utilisation est en revanche déconseillée durant les phases de poussée de la maladie. En termes de protocole, une à trois injections sont préconisées, et il est recommandé de drainer systématiquement l’épanchement articulaire avant l’injection. « Il est aussi très important de bien établir le phénotype du patient et de définir avec lui des objectifs à atteindre », a conclu la spécialiste « et lorsque les objectifs ne sont pas atteints en suivant les recommandations de la SFR, le PRP peut alors être discuté ». D’après la communication du Dr Karine Louati, Service de rhumatologie, hôpital Saint-Antoine (AP-HP), dans le cadre du congrès SFR déc 2023.

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